lundi 26 juillet 2010

QUIRITE

QUIRITE

« Pettius, je n'écris plus de vers, je n'y ai plus de goût, frappé que je suis des traits de l'Amour, de l'Amour qui se plaît à m'enflammer, comme jamais aucun mortel, pour les jeunes garçons et les jeunes filles. »

Horace
Epode XI

Non, non et non! Je ne me découragerai pas, Egnatius, mon Ami,
Tu ne saurais pas arrêter, même si tu le voulais de tout ton coeur valeureux,
Le chant fervent de mes louanges enflammées,
Ni le flot cristallin de ma parfaite passion.

Je sais que tu m'aimes, ami cher et désintéressée,
Que tu me veux en paix avec mon âge avancé,
Joyeux et calme, souriant ami des abeilles
Et furieusement amoureux des divines saveurs des vins.

Mais je ne peux m'empêcher d'admirer
Le jeune Caius Pomponius Crassus,
L'éphèbe toujours adorable
Et toujours adoré!

Je tourmenterai de ma constance patricienne
Tous les mots vierges de notre langue virile
Pour exalter le plus splendide des enfants que notre Rome
Ait jamais vu naître,
Ce fils sublime, cette fleur chérie de la Beauté.

Je chanterai Egnatius,
Je publierai, sans retenue, mon amour
Pour son visage où l'antique pudeur étrusque s'épanouit
Avec toute la fraîcheur d'es jours printaniers.

Je glorifierai son corps de neige des Alpes vierges
Où chaque jeune muscle, chaque harmonieuse courbure
Ont été ciselés, avec ardeur, par un dieu virtuose,
Amoureux de l'extrême perfection.

Le sommeil, mon Egnatius, intraitable,
Refuse de fermer mes paupières fatiguées
Quand, insidieuse, la rude passion me fait pense à lui,
A ses bras de marbre veiné,
A ses yeux où brille toute la chaude lumière des étés siciliens,
A sa rayonnante poitrine de tendre adolescent,
A son abondante chevelure parfumée,
A sa bouche vermeille que convoitent, dans une folie pure,
Toutes les nymphes d'Italie et de Grèce!

Et les mots, Egnatius, mon fidèle Ami,
Les mots n'ont pas assez de mots pour décrire la grâce limpide de ses mains
Qui, d'un art accompli et d'une ardeur appliquée,
Savent faire sangloter les cordes de la lyre
Et siffler les flèche mortelle des guerriers !

Crois-moi, noble quirite,
Il ne m'est point possible, sans mourir, d'imposer le silence à mon coeur,
Sache qu'il m'est doux de m'abandonner à la folie
Que provoque en moi son sourire
Quand il vient, par hasard, caresser mes pensées!

Ô, Egnatius,
L'aimer abrège la pesante lenteur de mes journées romaines
Et sauve mon âme des glaces sévères de l'ennui!

Athanase Vantchev de Thracy

Saint-Germain-en-Laye, ce lundi 26 juillet 2010



Glose:

Quirite (n.m.): dans l'Antiquité s'appliquait aux citoyens romains.

Egnatius : prénom et patronyme d'origine latine. Variantes contemporaines: Ignace en français (prénom masculin et féminin), Ignacio en espagnol.

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