EDOUARD II ET HUGUES DESPENSER
A Norton Hodges
« Adieu, Hugues, adieu,
Je ne te verrai plus, ma chère vie, ma belle âme,
On m’aura donc tout prisé. »
Edouard II
Chacun connaît son heure de lumière
Et sa saison de ténèbres,
Et il n’y a pas de mots adéquats
A l’incommensurable,
Des mots extrêmes et simples !
Mais qui peut modifier
La charpente secrète de la langue ?
Qui ?
De tout ce que nous disons
Ne restent que les fastes cérémonieux des souvenirs !
Roi déboulé de ton socle,
Où sont à présent tes nuits ardentes
Dans les bras de ton amant impétueux,
Les chasses passionnante à courre,
Les banquets somptueux,
Les bouquets de fleurs exotiques,
La musique raffinée, les danses lascives,
Les molles averses des chants mélancolique
Les attouchements sensuels, les regards qui brillent,
Les mains qui tremblent, les corps enflammés de désir,
Les lits jaspés de rouge fuchsia
Où s’étale, nue et solennellement insouciante,
L’oisive concupiscence ?
Toi, tombé dans si grande misère,
Toi qui ne pourras plus admirer
Les beaux, les splendides,
Les vigoureux jeunes seigneurs
De ton royaume
Juter, parader, rire !
Ah ! Il aurait mille fois mieux valu pour toi
De courir tous les hasards
Que d’en venir à cette issue !
Ne savais-tu pas, roi d’Angleterre,
Que le temps et les êtres s’en vont
Comme les nuages que poussent avec ardeur
Les vents du sud,
Que le temps, les choses et les êtres
S’estompent comme des mirages ?
Voici que tout sombre, se brouille, s’efface
Hormis les parfums des amours perdues
Qui flottent dans les cœurs esseulés
Comme un immense, un immortel
Et immuable printemps !
Athanase Vantchev de Thracy
Marrakech, ce samedi 16 octobre 2010
Glose:
Édouard II d'Angleterre (1327-1327) : roi d'Angleterre de 1307 jusqu’à sa déposition en janvier 1327. Il est le fils du roi Édouard Ier (Plantagenêt) et d'Aliénor de Castille. Il est le sixième roi de la dynastie Plantagenêt, commencée avec Henri II, fils de Geoffroy Plantagenêt, comte d'Anjou. Compris entre les règnes vigoureux de son père Édouard Ier et de son fils Édouard III, celui d’Édouard II est marqué par l’incompétence, les querelles politiques et les défaites militaires. Édouard est, sa vie durant, plus enclin aux plaisirs de la cour et aux divertissements qu’à ses devoirs de souverain. Il est incapable de refuser les plus grandes faveurs à ses divers favoris, dont les plus célèbres sont Pierre (Piers) Gaveston, un chevalier d’origine gasconne qui est fait comte de Cornouailles, puis un jeune seigneur anglais, Hugues le Despenser, provoquant de constants troubles politiques et, probablement, à terme, sa déposition.
Hugues le Despenser dit « le Jeune » (1286 - 1326) est le second favori du roi Edouard II d’Angleterre qui le laisse gouverner à sa place. Il est le fils d'Hugues le Despenser dit l'Ancien et d'Isabella de Beauchamp.
Après la mort de Pierre Gaveston en 1312, le roi témoigne d'une faveur grandissante envers son neveu par alliance (également beau-frère de Gaveston). Mais, comme avec Gaveston, les barons sont rapidement indignés par les honneurs que le roi fait pleuvoir sur les Despenser père et fils, particulièrement à partir du moment où Despenser le Jeune, en 1318, se met en tête de se faire attribuer le comté de Gloucester.
En 1320, la situation politique anglaise recommence à être dangereusement instable. Édouard transgresse la loi en faveur de Despenser le Jeune : lorsque le seigneur de Braose de Gower vend son titre à son gendre, procédure parfaitement légale dans les marches galloises, Despenser demande au roi de lui céder Gower en lieu et place du bénéficiaire. Contre le droit et la loi, Édouard confisque Gower qu'il offre à son favori, déclenchant immédiatement la fureur de la plupart des barons. En 1321, le comte de Hereford, en accord avec le comte de Lancastre et d'autres seigneurs, prend les armes contre la famille Despenser, et le roi est contraint de trouver une issue à la crise. Le 14 août, à Westminster, accompagné des comtes de Pembroke et de Richmond, le roi déclare bannis les Despenser, père et fils.
La victoire des barons montre cependant la limite de leur cohésion : avec le départ des Despenser, beaucoup de seigneurs, oublieux de leurs liens familiaux et politiques veulent remplir le vide laissé par les deux favoris. Désireux de gagner les bonnes grâces d'Édouard, ces seigneurs aident Édouard dans son désir de vengeance contre les barons, dans le seul but d'accroître leurs propres fortunes et pouvoir. Les campagnes qui suivent voient l'exécution de nombreux opposants à Édouard, dont le comte de Lancastre, propre cousin d'Édouard (il était le fils d’Edmond « le Bossu », frère du roi Édouard Ier), décapité en présence du roi lui-même.
L'opposition abattue, les Despenser de retour, le roi et ses favoris deviennent les maîtres incontestés du royaume : au Parlement de York, en 1322, Édouard publie une loi qui abroge toute ancienne ordonnance limitant son pouvoir et empêchant tout tentative d'empiétement. Le roi n'est plus soumis à la volonté du Parlement, et les hauts seigneurs, les prélats et les
En septembre 1326, Roger Mortimer et Isabelle de France débarquent en Angleterre. L'invasion a bientôt trop de renfort et de soutien pour pouvoir être contenue. Par conséquent, le roi ne parvient pas à réunir l'armée qu'il souhaite, et tant Édouard que les Despenser se voient bientôt totalement isolés. Ils quittent Londres le 2 octobre, laissant la ville sombrer dans le chaos. Le 15 du même mois, un soulèvement de la population conduit à la capture puis la décapitation de John le Marshal – Londonien accusé d'être un espion à la solde des Despenser – et du trésorier d'Édouard, Walter Stapledon, évêque d'Exeter, avec deux de ses écuyers. Le roi trouve tout d'abord refuge à Gloucester (il l'atteint le 9 octobre), puis fait voile vers le sud du pays de Galles, afin d'organiser sa défense sur les terres des Despenser. Mais Édouard se voit dans l'incapacité de monter une armée et ses propres serviteurs l'abandonnent, lui et Despenser le Jeune, le 31 octobre.
Le 27 octobre déjà, Despenser l'Ancien avait été accusé d'encourager le gouvernement illégal de son fils, de s'enrichir aux dépens des autres, de spolier l'Église et d'avoir pris part à l'exécution illégale du comte de Lancastre. Il est pendu puis décapité à la potence de Bristol. Henri de Lancastre, comte de Leicester, est alors envoyé au pays de Galles, afin d'en ramener le roi et Despenser le Jeune et, le 16 novembre, Henri s'empare d'Édouard, de Despenser le Jeune et de leurs proches, près de Tonyrefail (où une plaque rappelle aujourd'hui l'événement). Les soldats royaux sont relâchés, Despenser le Jeune est envoyé auprès d'Isabelle à Hereford, tandis que le roi est amené à Kenilworth par son propre cousin.
Surnommé « Mignon » d'Édouard, il est reconnu coupable de haute trahison et condamné à être « Hanged, drawn and quartered » (expression utilisée jusqu'en 1870 dans le code pénal anglais décrivant les supplices subis : la pendaison, l'infamie d'être traîné sur une claie et l'écartèlement).
Il est supplicié en public le 24 novembre 1326, ses parties génitales coupées puis incinérées, avant d'être éviscéré puis exécuté. Sa tête est exposée à Londres quelque temps après l'exécution.
samedi 16 octobre 2010
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