Benedictus
Missa Solemnis de Beethoven
A Janmarc Rothfuss
In Memoriam
“Hic est qui venit per aquam et sanguinem”
(Voici celui qui vient par l’eau et par le sang »)
Epître du Dimanche de la Passion
I.
Jeanmarc, mon Ami,
Ce soir, assis devant la solitude de la fenêtre vide,
J’écoute, en pensant à toi, l’être devenu éther lumineux, la
Missa Solemnis de Beethoven !
Dehors, le vent monte du sol, glisse sur les tiges des fleurs
Et fait vibrer la terre avant d’atteindre les cimes des nuages.
L’air ému ne retient plus la lumière de tes yeux enflammés
Devant la porte,
Abîme fragile entre la vie et la mort,
Qui garde son frissonnant bâillement !
II.
Et cette musique simple et solennelle,
Espérance en l’homme, espérance en l’infini !
Toi, mon tendre Seigneur, qui te manifestes vraiment
A l’autel blanc sous les espèces si terrestres du vin et du pain !
Ces sons suaves et divins, cette présence céleste
Si difficile à supporter,
Les frissons de ton cœur qui donne
L’excellence de sa miséricorde
Aux sons de cette messe !
III.
Janmarc, Âme,
Laisse flotter librement la mélodie
De la tristesse sur le velours du soir !
Qu’elle berce, qu’elle envoûte, qu’elle engendre
La divine espérance dans les prunelles
De ceux qui, gardant le silence
Comme une pierre précieuse dans leurs mains,
Se meuvent et souffrent avec l’avancée des pénombres !
Ceux qui, craintifs, recouvrent en cachette leurs sanglots
D’une pudique chlamyde de pétales de violettes !
Musique de la Messe, fais que l’éclat des mots rejaillisse
Sur nos visages et dans nos paroles !
III.
Janmarc, Äme,
Ton visage se rapproche des caresses de nos doigts
Comme une pluie. Comme le vent,
Ta beauté entre dans nos cœurs ouverts aux rumeurs des années !
IV.
Comme elles sont limpides et complexes les notes qui suivent
Et précède la nuit !
Comme elles connaissent, dans leur soyeuse élégance,
Le terrible langage, les sanglantes blessures
Des départs inattendus !
V.
Dites, comment vivre ensemble
Quand les cœurs sont séparés ?
VI.
Chagrin, aussi sinueux que le vol des agiles hirondelles,
Presse ma main de parachever le doux tissu
De mon chant qui exalte l’Ami
Avant la venue du grand froid !
Je me lève, cours, ramasse fébrilement les mots
Du poème,
Les serre contre mes paupières humides et m’en vais,
Tout tremblant, en ta compagnie, Ami aimé,
Le long
Des allées où se sont tus à jamais
Les battements de tes pas.
VII.
Le temps se tait
Et passe, et s’éloigne dans l’air frileux,
La blanche fumée de l’âtre fidèle
Autrefois réjoui par les chants de ta voix enfantine,
De ton rire adolescent,
De ta paix cordiale.
VIII.
Janmarc, Âme,
Ce soir, en écoutant
La Missa solemnis de Beethoven,
Mes cils caressent les souvenirs
De ta vie jadis pleine de joie étincelante !
Ici, dans cette maison vertigineuse
Au bord de la rivière mystérieusement infranchissable.
Ami, sors de ton silence, souris-moi,
Attelle les premières étoiles
Et pars pour ta promenade de long parcours !
Athanase Vantchev de Thracy
Paris, le 12 décembre 2010
Je dédie ce poème au fils bien-aimé de mon ami Uli Rothfuss qui a rejoint le chœur des anges transparents.
Glose :
Chlamyde (n.f.) : du grec chlamus / χλαμύς. La chlamyde est une draperie portée exclusivement par les hommes et originaire de la Grèce antique et plus précisément de Thessalie.
Il s'agit d'un manteau d'une seule pièce de tissu carrée ou rectangulaire et sans coutures. Cette pièce de tissu mesurait généralement environ 2 mètres de longueur sur 1 mètre de largeur et tombait jusqu'aux genoux. Parfois, sa longueur pouvait être supérieure à 2 mètres pour lui permettre de descendre jusqu'à terre. Elle pouvait se porter seule à même le corps ou sur un chiton. Elle se différencie de l'himation, car elle comportait une attache sur l'épaule droite ce qui laissait le bras dégagé.
Ce vêtement était principalement utilisé par les cavaliers, les voyageurs et les jeunes gens. Ces derniers le portaient d'ailleurs durant toute leur éphébie. À partir d'Alexandre le Grand, la chlamyde pourpre servait de manteau royal.
dimanche 12 décembre 2010
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