A Fabrice Coupechoux
« Âmes qui surpassez les rochers en dureté »
Du Perron
I.
Sous les hauts menhirs,
Lieux sacrés et axe du monde,
Points célestes fixes et repères des saisons,
Images sacrées du grand Pèlerinage,
Dorment les âmes des hommes sans âge !
Je contemple,
Touché par la grâce des impénétrables Celtes,
Les mouvements incarnés de leur génie !
Comme mes rêves passent
Sous la fine lumière de l’émotion !
Ah, ces heures qui jouent
Avec les embruns des vagues !
Comme tout est mort et tout est vie !
Comme l’eau nous lave de ses oublis !
II.
Et je pense soudain au Livre de Kells,
À ces majestueuses, à ces somptueuses enluminures !
Beauté éblouissante et fastueuse des coloris,
Excellence vertigineuse des techniques de finition :
Fruits, fleurs, feuilles, animaux et créatures magiques,
Faits fabuleux et phrases tremblées
Témérité fringante et si profondément réfléchie des esprits!
Intelligence nostalgique et virtuosité princière !
III.
Et c’est toujours et partout ce tremblement des âmes,
Ces mains vigoureuses qui n’ont de cesse qu’elles
N’atteignent la vibrante clarté de l’essence !
Ô mon âme, bois, calme et debout,
Toute cette beauté et meurs dignement !
Ô mon cœur, dis-moi,
L’homme avance-t-il jamais le jour de sa mort
En pénétrant le mystère des divins symboles
Et lisant le cadastre secret
Des mouvantes constellations du ciel ?
Menhirs qui vivent si puissamment
Dans l’air insomnieux
Et dans notre chair !
Athanase Vantchev de Thracy
Paris, le 24 janvier 2014
Glose :
Menhir (n.m.) : le menhir est une pierre dressée, plantée verticalement. Ils se rencontrent de façon générale un peu partout en Afrique, Asie et Europe, mais c'est en Europe de l’Ouest qu'ils sont le plus répandus.
Le terme « menhir » est construit à partir du breton maen, « pierre » et hir, « long ». Il semble que ce soit Théophile-Malo de la Tour d’Auvergne-Corret qui, le premier, officialise le terme « menhir », dans son ouvrage « Origines gauloises. Celles des plus anciens peuples de l'Europe puisées dans leur vraie source ou recherche sur la langue, l'origine et les antiquités des Celto-bretons de l'Armorique, pour servir à l'histoire ancienne et moderne de ce peuple et à celle des Français », publié entre 1792 et 1796.Le Livre de Kells également connu sous le nom de Grand Évangéliaire de saint Colomban : manuscrit illustré de motifs ornementaux et réalisé par des moines de culture celtique vers l’an 820.
Considéré comme un chef-d'œuvre du christianisme irlandais, il constitue malgré son inachèvement l'un des plus somptueux manuscrits enluminés ayant pu survivre à l'époque du Moyen Âge. En raison de sa grande beauté, le manuscrit est considéré par beaucoup de spécialistes comme l'un des plus remarquables vestiges de l'art religieux médiéval. Rédigé en langue latine, le Livre de Kells contient les quatre Évangiles du Nouveau Testament ainsi que des notes liminaires et explicatives, l’ensemble étant accompagné de nombreuses illustrations et enluminures colorées. Le manuscrit fait aujourd'hui l'objet d'une exposition permanente à la bibliothèque du Trinity College de Dublin.
Jacques Davy du Perron (1556-1618) : prélat, diplomate et poète baroque français.
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