LA NUIT AMAZIGHE
« L’éternité nous est si native et profonde
Qu’il nous faut bien, de gré ou non, être éternel »
Angelus Silesius
La nuit amazighe, toute tissé de soupirs d’oranger,
Entre dans les maisons sans frapper à la porte.
Alentours, le calme est si aérien et si imprégné de parfums
Qu’il paraît vouloir dorer en profondeur le silence.
Les fleurs des jardins, flammes liquides et ondoyantes,
Raréfient l’air scintillant et rendent plus précise la tendresse.
Au loin, les sommets vierges de l’Atlas, endormis
Dans le lit duveteux des étoiles,
Semblent avoir renfermé dans leurs paupières neigeuses
Le livre prophétique de l’univers.
L’éclat pur d’une image lointaine
Vient, un bref instant,
Caresser la tête des enfants
Elégamment posée sur l’étoffe légère de la couche.
Les corps se métamorphosent en musique
Et toute leur respiration devient chant
De reconnaissance et d’amour !
Ô nuit, divine nuit amazighe,
Charge la barque de mon âme
De toute la splendeur des hommes du sud !
Rends parfaite et totale l’union de mes mains
Avec ce maintenant sans borne ni fin
Afin que je puisse répéter avec le poète allemand,
En défaillant d’émotion :
« La rose est sans pourquoi, elle fleurit parce qu'elle fleurit,
N'a pour elle-même aucun soin, – ne demande pas : suis-je regardée ? »
Athanase Vantchev de Thracy
Paris, le 10 novembre 2008
Glose :
Johannes Scheffler (1624-1677) : poète religieux allemand d’inspiration mystique plus connu sous le nom de Angelus Silesius, sous lequel il publia ses œuvres.
Johannes Scheffler naquit à Breslau, en Silésie. D'abord luthérien, il se convertit au catholicisme en 1652. Sa principale œuvre de polémique est la Conviction morale motivée ou démonstration selon laquelle l'on pourrait et devrait contraindre les hérétiques à la vraie foi (publié en 1673). Très influencé par les mystiques allemands et flamands du Moyen Âge, et notamment par Maître Eckhart, Henri Suso, Jean Tauler et Ruysbroeck, il a écrit de nombreux poèmes qui ont tous été compilés dans deux ouvrages, parus tous deux en 1657 :
1. Cherubinischer Wandersmann oder Geistreiche Sinn- und Schlussreime zur göttlichen Beschaulichkeit anleitende (édité une deuxième fois en 1675) qui est constitué de 1676 distiques et 10 sonnets.
2. Saintes délices de l'âme ou Eglogues spirituelles de Psyché amoureuse de son Jésus (recueil de Lieder).
Très lu par les poètes et philosophes de culture allemande dès le XIXe siècle, son influence posthume s'étendit sur la poésie de Rilke, sur la philosophie de Schopenhauer et Heidegger.
Atlas : massif montagneux du nord de l'Afrique. Il s'étend du sud-ouest au nord-est, en s'abaissant progressivement, sur les trois pays du Maghreb : Maroc, Algérie, Tunisie.
L’Atlas marocain : le Maroc est un pays de montagnes. Elles occupent, au-dessus de 1000m, près du 1/4 de son territoire et comprennent plus de 1/6 de sa population. Ces montagnes s'articulent autour du Haut Atlas avec ses deux plus grands massifs, Toubkal (4167m) et le M'Goun (4068m), qui constitue la pièce maîtresse de l'édifice montagneux du Maroc, et traverse tout le pays du sud-ouest, vers Agadir, au nord-est, vers Bouarfa.
Au nord, s'appuyant sur le Haut Atlas et sensiblement parallèle à lui, s’étend le Moyen Atlas. Au Sud, se dresse l'Anti Atlas (2530m), prolongé à l'est par le massif du Sarho (2712m). Enfin, le massif volcanique du Sirwa (3305m) constitue, à hauteur du massif du Toubkal, un véritable pont orographique entre le Haut Atlas et l’Anti Atlas. Orographique (adj.) : du mot grec oros / ’όρος, « montagne, colline, hauteur » et le verbe grapho : γράφω, « tracer des signes », « écrire ». Ce qui se rapporte au relief. Exemple : onde orographique ; celle-ci se produit lorsqu'une masse d’air est forcée en altitude par son déplacement au-dessus d'un relief montagneux. En gagnant de l'altitude, cette masse d'air prend de l'expansion et se refroidit par détente adiabatique (transformation thermodynamique). Ce refroidissement entraîne une augmentation de l’humidité relative et peut provoquer l'apparition de nuages ou de précipitations. Le sens orographique dans une vallée ou un vallon est le sens dans lequel coule l'eau. On définit ainsi la rive droite et la rive gauche.
De toutes les activités sportives qui se pratiquent au Maroc, la randonnée pédestre ou à ski l'hiver, est celle qui est la mieux adaptée au Haut Atlas et aux massifs avoisinants. Même les « 4000m » sont facilement accessibles au Maroc. Ceci est dû à un exceptionnel réseau de sentiers muletiers, un climat et un ensoleillement incomparables et à une absence de glacier. La population amazighe (berbère) qui habite ces contrées a su conserver ses traditions ancestrales, notamment dans les domaines de l'architecture, des costumes et des danses.
Son nom évoque le mythe grec du géant Atlas condamné par Zeus à supporter sur ses épaules la voûte céleste. Atlas / Ἄτλας, « le porteur », du verbe grec tláô / τλάω, « porter, supporter ») était un Titan. Il était le fils de Japet et de Thémis (ou de Clymène ou encore Asia) et le frère de Prométhée, Epiméthée et Ménoetios.
Il engendra notamment les Pléiades (avec Pléioné), les Hyades (avec Ethra), les Hispérides (avec sa propre nièce Hespéris) et la nymphe et reine de l’île d’Ogygie, la presqu’île de Ceuta en face de Gibraltar, Calypso. Après la révolte des Titans contre les dieux de l’Olympe, il fut condamné par Zeus à soutenir les cieux jusqu'à la fin des temps.
Atlas est mêlé à plusieurs légendes, notamment celle des pommes d’or des Hespérides : Héraclès vint le voir pour qu'il aille cueillir les pommes pour lui ; Atlas accepta à condition qu'Héraclès soutienne le monde à sa place pendant ce temps. Il a donné son nom au massif de l’Atlas, où l'on place traditionnellement sa résidence (Hésiode l'avait situé aux confins occidentaux du monde), ainsi qu'aux atlas de géographie. Dans le corps humain, la première vertèbre cervicale, qui soutient l'ensemble du crâne, s'appelle également atlas. Certains récits de la mythologie, comme ceux de Diodore de Sicile, identifient le Titan Atlas au roi éponyme de l’Atlantide.
« La rose est sans pourquoi, elle fleurit parce qu'elle fleurit,
N'a pour elle-même aucun soin, – ne demande pas : suis-je regardée ? » : vers d’Angelus Silesius devenus le centre de la pensée du plus grand philosophe du XXe siècle, Martin Heidegger.
mardi 11 novembre 2008
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