mercredi 17 septembre 2008

QUELQUE PART, UNE MAISON

QUELQUE PART, UNE MAISON

A Adolphe Monticelli

« Nos fautes sont comme des grains de sable en face de la grande montagne des miséricordes de Dieu »

Le curé d’Ars

Revenir dans cette maison
Où l’essence du temps ne change jamais,
Où dans les plis de son mouvement éternel
Reste, impalpable et toujours égale à elle-même,
La divine permanence des choses immortelles !

Monter doucement, très doucement,
Avec des précautions de papillon,
Une après l’autre, les marches usées
Du vieux perron à encorbellemen,
Silencieux sous la lumière violette du soir.

Avancer comme un promeneur tremblant
De la fraîcheur des fleurs,
Comme un homme au cœur plein de souvenirs
Qui tourne son regard vers un endroit
Où il n’y a plus rien à voir,
Où le jardin lentement se fane
Et s’évanouit comme déjà chassé
Hors du monde !

Et qui se demande, transi de douceur, si quelqu’un
Peut dire encore l’essence des êtres
Et la suavité que procure à l’âme
La lumineuse apparition
Des visages aimés dans le sommeil.

Mais qui,
Qui peut dessiner la face infigurable de l’amour pur,
Le cadastre imprécis de la mémoire fatiguée ?

Une maison, quelque part au bout du monde
Lointaine et inexorablement proche ?
Avec des chambres calmes et bien rangées
Comme les fleurs d’un antique herbier,
avec des rideaux anciens en fines dentelles blanches
A chaque fenêtre !

Et des oiseaux, des oiseaux agiles
Auxquels une main tremblant d’émotion
Jettent des graines et des rêves,
Beaucoup de rêves
Venus des plus lointains horizons !

Des oiseaux qui, à l’aube,
Appelleront de leur voix d’eau
La lumière du matin
Avant de devenir maîtres absolus du ciel !

Athanase Vantchev de Thracy

Paris, ce mardi 16 septembre, Anno Christi MMVIII


Glose :

Adolphe Monticelli (1824-1886 : peintre français auquel je voue une très grande admiration. L'œuvre de Monticelli surprend par sa grande diversité. Le personnage, très discret, est éclectique : il fut ami du peintre français Narcisse Virgilio Diaz, appelé aussi Díaz de la Peña (1807-1876), admira Rubens (1577-1640), Véronèse (1528-1588) et Watteau (1684-1721), fut lié à Cézanne (1839-1906). Monticelli était admiré par Van Gogh (1853-1890). On retrouve dans toutes ses peintures des affinités plus ou moins grandes avec ces artistes. Les tons de ses toiles sont très beaux, très chauds. Il s’en dégage une atmosphère pleine de tendresse et de poésie.

Jean-Marie Vianney, le curé d’Ars (1786-1859) : saint français, né dans une famille de cultivateurs originaires de Dardilly, dans la région lyonnaise.

En 1806, le curé d’Écully, M. Balley, ouvrit un petit séminaire où Jean-Marie fut envoyé. C’était un élève médiocre, surtout parce qu'il avait commencé à étudier très tard. Il éprouvait de grandes difficultés, et ses connaissances se limitaient à un peu d’arithmétique, un peu d’histoire et de géographie. L’étude du latin était pour lui un supplice bien qu’il fût aidé par son condisciple Mathias Loras, devenu le premier évêque de Dubuque (Iowa, Etats-Unis). Il fut ordonné prêtre en 1815 et envoyé comme vicaire de M. Balley, puis, après la mort de celui-ci, comme curé à Ars, village de la région lyonnaise qui comptait environ 200 habitants à l'époque.

En 1824, il ouvrit une école de filles dite "Maison de la Providence". Il fit de Catherine Lassagne, humble femme et sa fidèle servante, responsable de son école après l'avoir catéchisée. Il l'appelait "la plus belle fleur de mon jardin" car il avait perçu chez elle le don de comprendre l'amour de Dieu. Dès 1830 commença l’afflux des pèlerins à Ars. En1849, il fonda l'école des garçons, confiée aux Frères de la Sainte Famille de Belley.

Le curé d'Ars était déjà considéré comme un saint de son vivant tant il était dévoué à l'œuvre de Dieu. Il disposait de grâces étonnantes notamment comme confesseur. Sa charité était par ailleurs sans limite : il mangeait peu, passait des heures entières en adoration du Saint-Sacrement. Il dormait peu, surtout à la fin de sa vie, passant jusqu'à seize heures par jour à confesser et à redistribuer tout ce qu'on lui donnait, n'hésitant pas à se démunir encore pour subvenir aux besoins de plus pauvre que lui. Il mourut complètement épuisé.

Encorbellement (n.m.) : de en et corbeau, lui-même du latin corvus. Position d’une construction (balcon, corniche, tourelle) en saillie sur un mur, soutenu par des corbeaux, des consoles.

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