mercredi 23 septembre 2009

YATATE

YATATE

A Geneviève de Rouvre

Je contemple le yatate en bambou
A décor sculpté et incrusté d’ivoire teinté.
Un joyeux martin-pêcheur en bois laqué ikkô
Posé sur la délicate branche d’un jeune prunier vert d’eau
Suit du regard étincelant la frêle libellule
Venue un instant oublier sa fatigue
Sur une feuille nacrée de lotus !

Le cœur tremblant,
Je pense au scribe qui a tenu
Dans ses mains aux doigts effilés
Cette magnifique écritoire !

Qui était-il, ô mon âme ?
Sont-ils vivants encore les poèmes
Que d’un pinceau imbibé de passion exaltée
Il a tracés sur la douce élégance
Des feuilles d’ambre ?

Dis-le moi, ô mon âme,
Dis-moi son nom
Afin que je le porte en moi
Comme un gage d’éternité !

Athanase Vantchev de Thracy

Paris, le 23 septembre 2009

Glose :

Yatate (n.m.) : jeu d'écriture personnel en forme de pipe, utilisé dans le Japon médiéval. Il est constitué d'un compartiment contenant un coton imbibé d'encre et d'un étui pour un pinceau (et éventuellement un coupe-papier).

Yatate signifie littéralement « support pour flèches » (ya, « flèches », tate, « support »). Le nom provient de ce que traditionnellement, les bushi (guerriers gentilshommes) utilisaient leur pierre à encre comme fond de carquois.

La calligraphie traditionnelle japonaise a été empruntée à la Chine. Elle utilisait ce « trésor du lettré » composé d’une pierre à encre, d’un sumi (bâtonnet) et des pinceaux. L'encre liquide était obtenue en frottant le bâtonnet contre la pierre et en y ajoutant de l'eau. L'ensemble était encombrant, lourd, et la préparation de l'encre prenait un certain temps.

Durant l’ère Kamakura (1185-1333) est apparu l'idée de sursaturer le morceau de coton d'encre. De cette façon, il suffisait de toucher le coton avec le pinceau pour être prêt à écrire. En mettant le coton dans un sumi tsubo » (compartiment à encre), on pouvait transporter en permanence de l'encre prêt à l'usage, sans risquer de le renverser.

Les premiers yatate ressemblaient à des plumiers ; le modèle en forme de pipe fut conçu pour augmenter la quantité d'encre transportée. Vers la fin de l’ère Edo (1600-1868), une variante du dernier modèle est apparu, où le compartiment à encre était relié à l'étui à pinceau par une chaînette et servait de netsuke pour fixer le yatate à la ceinture (le modèle « en pipe » était simplement fiché dans la ceinture comme un éventail).

Pendant les temps où porter un nihonto (sabre japonais) était interdit en dehors de la caste des bushi, certains yatate étaient conçus de façon à pouvoir servir d'arme d'autodéfense. Il existe ainsi des exemples de yatate cachant des armes à petites lames.

L'une des caractéristiques remarquables des yatate récents est que certains sont faits d'un alliage spécial d’or et de cuivre, le shakudo, conçu spécifiquement pour sa belle patine rouge sombre.

Le netsuke est une pièce vestimentaire traditionnelle japonaise servant à maintenir les sagemono (littéralement « objets suspendus »). Ce mot se décompose étymologiquement en (ne, « racine »), et (tsuke, « attacher »).

Sur le plan artistique, il n'est pas exagéré de dire que le netsuke représente la tradition artistique naissante du Japon.

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