ANNETTE VON DROSTE-HÜLSHOFF
A Eloi de R.
“I am unable, yonder beggar cries,
To stand, or move; if he say true, he lies.”
John Donne,
A Lame Beggar
Oui, Annette von Droste-Hülshoff,
La joie est éphémère,
Mais elle peut revenir à tout moment.
Rien, Annette, ne repousse plus vite
Que le désir d’espoir, que les illusions.
Votre tendresse pour le jeune Levin Schücking,
Poète adolescent,
Me met délicieusement mal à l’aise.
Vous avez senti la forêt de bonheur,
Le stigmate sur votre cœur d’un mot plein d’affection,
La balafre que laisse sur la peau une caresse,
La provende de l’amitié !
Vous avez rejeté, soudain enivrée,
Le lourd voile de la divine vertu,
L’obscurité du silence,
Derrière l’horizon de la verte Westphalie.
Vous vous êtes agrippée au sourire du printemps
Pour vivre,
Pour être enfin existence et gaieté.
Vous avez connu, Freilin Annette,
Au-delà des avancées hésitantes du temps,
La subtile, la sublime alchimie
De deux âmes
Qui s’accomplissent en une.
Ah, que n’ai-je étudié l’allemand !
Mais comme Félix Vicq d’Azyr,
J’ai été très malade
Et suis mort, Freilin Annette
Comme un gueux.
Athanase Vantchev de Thracy
Paris, ce jeudi 15 octobre 2009
Glose :
Annette von Droste-Hülshoff (1797-1848) : son vrai nom est Anna Elisabeth Franziska Adolphine Wilhelmine Louise Maria, Freilin von Droste zu Hülshoff. Un des écrivains allemands les plus importants du XIXe siècle. Elle est le poète de la Westphalie, où se déroula presque toute sa vie, entre le château de ses ancêtres et sa demeure de Rüschhaus. Sa vie monotone fut vouée à la solitude, à la fidélité envers sa caste, au respect de sa famille et de ses traditions. L'amour qu'elle connut tard, à Meerburg, ne put apparaître que sous le masque de l'amitié. Tout, dans son existence, semble être placé sous le signe de la vertu et de la résignation. Mais on peut détecter sous ce calme apparent des aspects tragiques, un désarroi profond, et aussi une violence contenue dont l'œuvre seule donne parfois la mesure. Elle voua une passion secrète au jeune Levin Schücking, poète adolescent dont elle aurait pu être la mère. Elle entretint avec lui une correspondance suivie, à partir de 1839, l’accueillant à Meerburg, sur les bords du lac de Constance.
Eloi : prénom masculin. Du latin electus, « choisi », sous-entendu par Dieu. Son patron céleste est saint Eloi (588-660), forgeron et orfèvre limousin qui devint Maître des Monnaies du roi Clotaire II. Ayant abandonné cet emploi en 640 pour devenir prêtre, il fut bientôt sacré évêque de Noyon. Il évangélisa les régions d’Anvers, de Gand et de Courtrai, en Belgique, et fonda l’abbaye de Solignac, ainsi que plusieurs autres monastères et couvents. Saint très aimable, il était fort populaire au Moyen Âge. L’art le montre avec les outils de forgeron, variant suivant l’époque de la représentation.
John Donne (1572-1631) : poète et prédicateur anglais du règne du Jacques Ier, considéré comme le chef de file de la poésie métaphysique. Il a produit une œuvre variée comprenant des sonnets, des poèmes religieux, des traductions du latin, des épigrammes, des élégies, des chansons et des sermons.
Levin Schücking (1814-1883) : écrivain allemand, auteur d’un grand nombre de romans populaires. Il a subi l’influence du romancier romantique écossais Walter Scott. Ses travaux sont tombés dans l’oubli. Jeune, il entretint une correspondance amoureuse avec Annette von Droste-Hülshoff.
Félix Vicq d’Azyr (1748-1794) : médecin et anatomiste français. Après avoir été l’un des plus célèbres médecins parisiens en 1789, il se retrouva six ans plus tard à devoir se cacher comme un voleur, malade et traqué. Il mourut non sur l’échafaud, comme Lavoisier, mais d’une maladie qui semble avoir été la tuberculose.
vendredi 16 octobre 2009
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