samedi 31 mars 2012

Memoriam Rei Redintegrare (en anglais)

ENGLISH :


Memoriam Rei Redintegrare

(Recalling To Memory)

Memory, you alone never forget
The faces of men and things,
The world of flesh become pure abstraction.

I was life, I became word,
I was eternity, I became time.

Memory,always new
In the succeeding days.


Translated from the French of Athanase Vantchev de Thracy by Norton Hodges 30.03.12.

jeudi 29 mars 2012

SUMITE PSALMUM JUCUNDUM (en anglais)

ENGLISH :

Sumite Psalmum Jucundum
(Sing Sweet Psalms)

I.

On this flat field
Covered with madder flowers,
We sought, with eyes riveted to the zenith,
The world’s tuning fork.

It’s there that passerines
Were shaping the mouths around their resonant trumpets
To sound out
Their delectable songs.

It was the way our souls inclined,
The particularity,
The exaltation
Of our delighted tenderness.

We were faithful to our destinies
Just as a hub is faithful to a wheel,
Just as a perfume bottle is faithful
To the fragrant essences inside.

And we knew that
For the one who is born a poet without limit ,
Poetry is life and death.

II.

Tonight
The cicadas song follows
The scansion of our verses sculpted
On the funerary pillars.

Words sharp as rock,
Glazed stars
In the high lush junipers.
In the end, being but not being,
I exist here,
For ever.

MEMORIAM REI REDINTEGRARE

MEMORIAM REI REDINTEGRARE

Mémoire, toi seule n’oublies jamais
La face des hommes et des choses,
Le monde de chair devenu abstraction pure.

J’étais vie, je suis devenu mot,
J’étais éternité, je suis devenu temps.

Mémoire, toi toujours si neuve
Dans les jours qui se succèdent.

Athanase Vantchev de Thracy

Paris, le 29 mars 2012

Glose :

Memoriam rei reintegrare : expression latine qui signifie « rappeler quelque chose à la mémoire ».

mercredi 28 mars 2012

L'ENFANT AMAZIGH

L’ENFANT AMAZIGH

Je t’aime, enfant splendide, sourire délicieux
De l’air qui flotte torride sur les montagnes du sud,
J’adore tes yeux de feu où le soleil si rude
A déversé sa flamme et son amour heureux.

J’adore ton rire léger, tes dents de diamant,
Et tes cheveux bouclés où dort le jour rapide,
Le livre du désert que tes parents candides
Lisent sous la musique du sable et du vent.

Je t’aime quand tu écoutes les contes majestueux
Que ton limpide grand-père murmure à ton oreille
Quand, libre comme la brise, léger comme une abeille

Tu cours derrière le vol des oiseaux peureux.
J’aime ton pays antique, sa langue éblouissante,
Ses dieux toujours vivants, sa poésie vibrante !

Athanase Vantchev de Thracy

Paris, le 28 mars 2012

Glose :

Amazigh, amazighe (n.m. et adj.) : Amazigh est le singulier de Imazighen, nom des Berbères en langue tamazight (berbère). Les Imazighen (Berbères) sont les plus anciens habitants d’Afrique du Nord. Ils occupaient un immense territoire qui s’étendait de l'Ouest de la vallée du Nil à l'Atlantique et comprenait l'ensemble du Sahara. Ils y fondèrent de puissants royaumes formés de tribus confédérées. Connus dans l’Antiquité sous les noms de Libyens, Maures, Gétules, Garamantes ou encore Numides, ils connurent ensuite la conquête romaine, la christianisation, l'invasion vandale, la conquête arabe et la conversion à l’islam. Les jeunes générations, férues de leur longue histoire, de leur langue, de leur écriture, le tifinagh, de leurs dieux et de leurs traditions, embrassent avec ferveur l’idée d’un grand pays amazigh sur tous les anciens territoires où, en réalité, ils sont franchement majoritaires. Ils sont loin d’être Arabes comme on a l’habitude de les nommer.

SUMITE PSALMUM JUCUNDUM

SUMITE PSALMUM JUCUNDUM

I.

Sur cette belle aire
Recouverte de fleurs garance,
Nous cherchions, les yeux rivés au zénith,
Le diapason du monde.

C’est là que les passereaux
Embouchaient leurs sonores trompettes
Pour faire retentir
Leurs chants délectables.

C’était le parti pris de nos âmes,
La singularité,
L’exaltation
De notre tendresse de délice.

Nous étions fidèles à nos destins
Comme le moyeu
Est fidèle à sa roue,
Comme le balsamaire
Aux essences odorantes.

Et nous savions que

Pour celui qui est né poète sans limite,
La poésie est la vie et la mort ?

II.

Cette nuit,
Les cigales accompagnent
La scansion de nos strophes ciselées
Sur les cippes.

Mots amphiboles,
Etoiles vernissées
Dans les hauts genévriers luxuriants.

Enfin, être sans être,
J’existe ici,
À jamais.


Athanase Vantchev de Thracy

Paris, le 28 mars 2012

Glose :

Sumite psalmum jucundum : expression latine qui signifie « chantez des cantiques mélodieux ».

Aire (n.f.) : du latin area. Toute surface plane. Champ, domaine, zone. Ne pas confondre avec air, ère, ers (n.m.) – plante herbacée annuelle, appelée encore lentille bâtarde, haire (n.f.) – grossière chemise de poils de chèvre, de crin, portée à même la peau par esprit de mortification et de pénitence, hère (n.m.) – homme misérable.

Garance (n.f. et adj. invariable) : du latin médiéval waranita. Plante herbacée (rubiacée), cultivée autrefois pour la matière colorante rouge (alizarine, purpurine) extraite de sa racine (alizari). Teinture tirée de cette plante. Couleur de cette teinture rouge vif.

Diapason (n.m.) : outil de musicien donnant la hauteur d’une note conventionnelle qui sert de repère, en général le « la », afin que celui-ci accorde (étalonne) son instrument. Par extension, le diapason désigne la hauteur absolue de la note de référence mondialement acceptée (actuellement la fréquence du « la » est de 440 Hz)

Moyeu (n.m.) : du latin modiolus, « petit vase ». Partie centrale de la roue que traverse l’axe ou l’essieu autour duquel elle tourne.
Balsamaire (n.m.) : flacon à parfum. Le nom de balsamaire vient du mot latin balsanum qui a donné en français baume, balsamique, baumier. Ce récipient trouve son origine dans l'antiquité romaine. Il était en particulier utilisé dans les rites funéraires romains.
Cippe (n.m.) : du latin cippus, « colonne ». Petite colonne sans chapiteau ou colonne tronquée qui servait de borne, de monument funéraire et qui portait uns inscription. Stèle.
Amphibole (n.f.) : du grec amphibolos, « à double pointe ». Les amphiboles sont une famille de minéraux.

lundi 26 mars 2012

SINGSTEIN (français / anglais)

SINGSTEIN

(La pierre qui chante)

I.

Oui, tu disais que Dieu
Est notre pur alphabet,
Nos lettres, la calligraphie de nos cœurs !

Que dès qu’il sourit,
Le rien devient plus que tout !
Que nos paroles sont notre vrai visage !

J’aimais t’écouter
Parler de la pierre chantante,
De l’odeur violette de la terre
Après la pluie,
Du gazouillement des tisserins.

Et la ceinture de tes mots,
La saveur de manzanilla de tes sourires
Liaient ma taille à ta taille.

Ah, comme nous aimions manger
Des mûres noires !

II.

Abrupt, vorace, féroce,
Indéchiffrable,
Orné de brassées odorantes
De fleurs des champs
S’avançait le soir
Provoquant le chaos pélagique de nos poitrines,
Changeant les arbres en cathédrales d’effroi !

À cette heure,
En deçà du silence,
Les papillons fatigués
Battaient de leurs ailes
Mes pensées
Avec une élégante délicatesse.

III.

Je t’écoutais, Âme,
Et dans mes veines chaudes
S’engouffraient les barques blanches des étoiles !

C’était le temps des cerises rouges,
La saison des camomilles blanches,
Le temps où, dans ma craintive naïveté
Je répétais :

Oh, Sœur,
Sœur,

No me hagas sufrir !


Glose :

Singstein (n.m.) : mot allemand qui signifie « pierre qui chante ». Une pierre très rare qui émet des sons et possède des qualités acoustiques extraordinaires.
Tisserein (m.n.) : petit oiseau de la famille des Ploceidae dans l’ordre des Passériformes qui tisse un grand nid de feuilles où peuvent s’abriter plusieurs femelles et leurs couvées. Ces oiseaux portent ce nom vernaculaire du fait de la forme de conception de leur nid : c'est une sorte de boule sphérique ou conoïdale faite de filaments arrachés à de grandes feuilles tressés entre eux, dont l'entrée se trouve sur le dessous. L'examen attentif des nids montre qu'ils savent utiliser plus d'une douzaine de nœuds différents.
Manzanilla (n.f.) : vin de voile très pâle, piquant, léger au palais, sec et peu acide. Sa teneur en alcool, variant auparavant entre 15.5 et 17%, a été fixée à 15 degrés. C'est de ce fait le plus léger des vins de Jeres de la Fontera dans le sud de l’Andalousie. Il est surtout bu comme vin d'apéritif.
Il y en a principalement deux variétés: la manzanilla fina (fine) et la manzanilla pasada (passée). C'est, avec le vino fino, le vin typique des ferias (fêtes) andalouses. Les vins de voile se caractérisent par le développement spontané après fermentation alcoolique de levures formant un voile à la surface du vin au contact de l'air ambiant (durant sa phase de vieillissement en tonneau).
Pélagique (adj.) : du grec πέλαγος / pelagos, « haute mer ». Relatif à la haute mer. Qui vit dans les parties les plus profondes de la mer (abyssal, hadal).

No me hagas sufrir : expression espagnole qui signifie « Ne me fais pas souffrir »


ENGLISH :

The Singing Stone
I.
Yes, you used to say that God
Is our pure alphabet,
Our letters, the calligraphy of our hearts!
That as soon as He smiles,
Nothing becomes more than everything!
That our words are our true face!

I loved to listen to you
Talk about the singing stone,
The violet odour of the earth
After rain,
The chirping of the weaver birds.

And your words like a belt,
The taste of your smiles like Manzanilla wine
Linked us waist to waist.

Ah, how we loved
To eat blackberries!

II.

Abrupt, voracious, fierce,
Indecipherable,
Adorned with fragrant armfuls
Of wild flowers
The evening was advancing
Provoking the deep sea chaos in our souls,
Changing the trees into cathedrals of terror!

At that time,
Below the silence,
Tired butterflies
Beat their wings
Against my thoughts
With an elegant delicacy.

III.

I listened to you, my Soul,
And in my hot veins
The white fishing boats of the stars were swallowed up!

It was the time of red cherries,
The season of white camomiles,
The time when, in my fearful naivety
I would say again and again:

O, Sister,
Sister,
No me hagas sufrir!*

Translated from the French of Athanase Vantchev de Thracy by Norton Hodges, March 2012-03-24

*Don’t make me suffer

Poème en breton - A la Très Sainte Vierge !

Traduction libre du poème "A la très Sainte Vierge, ma céleste Protectrice" d'Athanase Vantchev de Thracy en langue bretonne
par Fabriz Coupechoux, lundi 26 mars 2012, 13:07 •
D'ar Werc'hez santel-meurbet, va Diwallerez selestiel
.
O mamm va Doue,
Da anv zo kaer, ha dous, ha tener
Da 'm c'halon,
Evel ma vez brañselladeg a-unan
An tulipez el liorzh.
.
E skrivañ a ran war gwennder ar folenn,
Ha zo eürus gant da zonedigezh em zi.
.
Te zo lorc'h eurioù doubl
An devezh,
Tan soutil an danvezioù.
.
Te zo, Gwerc'hez Karantez Doue,
Gwad ha c'hwezh an neñv
A dremen, noz-deiz,
Em gwazhied
Hag em c'homzioù.
.
Te zo, Mamm,
Ar vuhez a neizh
E skourroù c'hwezet mat
Va hun.

jeudi 22 mars 2012

SINGSTEIN

SINGSTEIN

I.

Oui, tu disais que Dieu
Est notre pur alphabet,
Nos lettres, la calligraphie de nos cœurs !

Que dès qu’il sourit,
Le rien devient plus que tout !
Que nos paroles sont notre vrai visage !

J’aimais t’écouter
Parler de la pierre chantante,
De l’odeur violette de la terre
Après la pluie,
Du gazouillement des tisserins.

Et la ceinture de tes mots,
La saveur de manzanilla de tes sourires
Liaient ma taille à ta taille.

Ah, comme nous aimions manger
Des mûres noires !

II.

Abrupt, vorace, féroce,
Indéchiffrable,
Orné de brassées odorantes
De fleurs des champs
S’avançait le soir
Provoquant le chaos pélagique de nos poitrines,
Changeant les arbres en cathédrales d’effroi !

À cette heure,
En deçà du silence,
Les papillons fatigués
Battaient de leurs ailes
Mes pensées
Avec une élégante délicatesse.

III.

Je t’écoutais, Âme,
Et dans mes veines chaudes
S’engouffraient les barques blanches des étoiles !

C’était le temps des cerises rouges,
La saison des camomilles blanches,
Le temps où, dans ma craintive naïveté
Je répétais :

Oh, Sœur,
Sœur,

No me hagas sufrir !


Glose :

Singstein (n.m.) : mot allemand qui signifie « pierre qui chante ». Une pierre très rare qui émet des sons et possède des qualités acoustiques extraordinaires.

Tisserein (m.n.) : petit oiseau de la famille des Ploceidae dans l’ordre des Passériformes qui tisse un grand nid de feuilles où peuvent s’abriter plusieurs femelles et leurs couvées. Ces oiseaux portent ce nom vernaculaire du fait de la forme de conception de leur nid : c'est une sorte de boule sphérique ou conoïdale faite de filaments arrachés à de grandes feuilles tressés entre eux, dont l'entrée se trouve sur le dessous. L'examen attentif des nids montre qu'ils savent utiliser plus d'une douzaine de nœuds différents.

Manzanilla (n.f.) : vin de voile très pâle, piquant, léger au palais, sec et peu acide. Sa teneur en alcool, variant auparavant entre 15.5 et 17%, a été fixée à 15 degrés. C'est de ce fait le plus léger des vins de Jeres de la Fontera dans le sud de l’Andalousie. Il est surtout bu comme vin d'apéritif.
Il y en a principalement deux variétés: la manzanilla fina (fine) et la manzanilla pasada (passée). C'est, avec le vino fino, le vin typique des ferias (fêtes) andalouses. Les vins de voile se caractérisent par le développement spontané après fermentation alcoolique de levures formant un voile à la surface du vin au contact de l'air ambiant (durant sa phase de vieillissement en tonneau).

Pélagique (adj.) : du grec πέλαγος / pelagos, « haute mer ». Relatif à la haute mer. Qui vit dans les parties les plus profondes de la mer (abyssal, hadal).

No me hagas sufrir : expression espagnole qui signifie « Ne me fais pas souffrir »

mardi 20 mars 2012

LAETITIA EXULTANS (en anglais)

Laetitia Exultans
(Transport of Joy)

This feverish jubilation of the first days of Spring
Coming from the magnificent rhododendrons ,
Doves’ wings embracing the face of the sun,
The fervent abundance of the blackbirds’ song
And this excess of sky above
The open windows
Of the houses!

I burn to hear sweet words,
As luminous as all the simple things that surround me.
I want the soul of my slender poem to be
As white and scented as narcissi.
I want, among all the humid scars of the night,
To see shining, like little yellow night lights,
The magic corollas of primroses
And the cobalt blue of violets in party dresses.

Let my voice lift on the arms of the breeze
And dispel the terrible darkness of yesterday’s troubles.

Let them go far from me
Tramontanes,
Suroîts,
Siroccos,
Skies fallen in tatters,
Thoughts that flee the light!

Let the morning ripen between my lashes
Like a red and juicy fruit.
Let me see, at last, the world
Vehementer laeteri!*

Translated from the French of Athanase Vantchev de Thracy 20.03.12.
*with much joy

lundi 19 mars 2012

LAETITIA EXULTANS

LAETITIA EXULTANS


Cette jubilation fiévreuse des premiers jours du printemps
Du côté splendide des rhododendrons,
Les ailes des colombes qui enlacent la face du soleil,
La fervente abondance des chants des merles
Et cet excès de ciel au-dessus
Des fenêtres ouvertes
Des maisons !

Je brûle d’entendre des mots de douceur,
Lumineux comme toutes les simples choses qui m’entourent.
Je veux que l’âme de mon grêle poème soit
Blanche et parfumée comme les narcisses.

Je veux que dans toutes les cicatrices humides de ma nuit
Brillent, petites veilleuses jaunes,
Les corolles magiques des primevères
Et le bleu de cobalt des violettes en robe de fête.

Que ma voix s’élève sur les bras de la brise
Et dissipe la noirceur terrible des soucis d’hier.

Loin de moi
Tramontanes,
Suroîts,
Sirocos,
Les ciels tombés en lambeaux,
Les pensées lucifuges !

Que le matin mûrisse entre mes cils
Comme un fruit rouge et juteux.

Que je voie, enfin, le monde
Vehementer laetari !

Athanase Vantchev de Thracy

Paris, ce dimanche 18 mars, Anno Christi MMXII

Glose :

Laetitia exultans : expression latine qui signifie « transport de joie ».

Rhododendron (n.m.) : du grec rhodon, « rose » et dendron, « arbre ». Arbuste ou arbre de la famille des Ericacées, à feuilles persistantes, à fleurs blanches, roses, rouges, violettes, dont de nombreuses espèces sont ornementales. Rhododendron des montagnes : rosage.

Bleu de cobalt : pigment minéral bleu violacé. De l'allemand Kobolt ou Kobold. Les Kobolds sont des mauvais génies des mines. Ils sont devenus les nains facétieux du folklore germanique, accusés de dénaturer ou voler les minerais précieux ou utiles, par exemple l’or. Ils lui substituent par farce un mystérieux minerai toxique nommé "de kobold", qui ne peut être fondu et ne peut donner, croyait-on autrefois, de métal.
Tramontane (n.m.) : nom donné à plusieurs vents soufflant vers le golfe du Lion. En Italie et en Provence, il s'agit d'un vent du Nord. Emprunté à l’italien tramontana (stella), « étoile polaire », lui-même du latin transmontanus. Ce mot désignait au début l’étoile polaire, puis un vent du Nord.
Suroît (n.m.) : mot normand, désignant le Sud-Ouest, mais aussi :
- un vent venant du Sud-Ouest
- un chapeau imperméable des marins
- une vareuse ou veste de marin
Siroco (n.m.) : vent saharien violent, très sec et très chaud, qui souffle sur l’Afrique du Nord et le Sud de la mer Méditerranée.

Lucifuge (adj.) : du latin lucifugus, « qui fuit la lumière ».

Vehementer laetari : expression latine qui signifie « avec beaucoup de joie ».

jeudi 15 mars 2012

BEATUS ILLE QUI (en anglais)

Beatus Ille Qui
(Happy The One Who..)

For Mario Quintana

I thirst for you
On this evening like lilac foam,
My constant friends:
Pink hyacinths, everyday things,
Blue words on bright purple lips
Like Quintana’s poems.

I feel nostalgic for Muscat wines,
Beaume-de-Venise,
I want scents:
Strawberry, vanilla, coriander,
Blue tits leaving the ground
Before even touching the sky.

I turn my gaze away
From sentences that are tangled up, jammed together, shut in,
From displays of wit that are ironic, cynical, cutting.

I, the simple scribe initiated
Into the ancient splendours of language
By the mystical Celtic knots
Of a humble and sweet solitude
Like the silk of idle hours
And the velvet of two eyes
Closing over the all-consuming fire of a tear.

Beatus ille qui procul negotiis...*

Translated from the French of Athanase Vantchev de Thracy by Norton Hodges 15.03.12.

mercredi 14 mars 2012

BEATUS ILLE QUI

BEATUS ILLE QUI

À Mario Quintana

J’ai, ce soir de mousse lilas,
Soif de vous, mes amis de toujours :
Jacinthes roses, choses quotidiennes,
Mots bleus sur des lèvres pourpres et claires
Comme les poèmes de Quintana.

J’ai la nostalgie de vins de muscat
De Beaume-de-Venise,
Le désir de parfums :
Fraise, vanille, coriandre,
D’envol de mésanges
Avant même d’avoir pris le ciel.

Je détourne mes yeux
Des phrases enferrées, coincées, cloîtrées,
Des jeux d’esprit ironiques,
Désabusés, incisifs.

Moi, le simple scribe initié
Aux splendeurs antiques de la langue
Par les mystique entrelacs
D’une solitude humble et douce
Comme la soie des heures oisives
Et le velours de deux paupières
Qui se referment sur le feu dévorant une larme.

Beatus ille qui procul negotiis…

Glose :

Beatus ile qui procul negotiis… début de l’Ode II d’Horace :

« Heureux qui, loin du monde, étranger aux affaires,
Cultive avec ses boeufs ses champs héréditaires,
Ainsi qu'au siècle d'or de nos premiers aïeux ! »

Mario de Miranda Quintana (Alegrete 1906 – Porto Alegre, Brésil, 1994) : un des plus grands poètes et traducteurs brésiliens, appelé le maître « des choses simples ».

Muscat (n.m.) : nom de vins qui recouvre un ensemble de cépages dont les raisins ont un arôme muscaté. Il en existe de nombreuses variétés, allant du jaune pâle au noir à reflets bleus. Leur vinification est particulièrement délicate. Tous les cépages muscat, qu’ils soient blancs ou rouges, qu’ils soient cépages de cuve ou cépage de table, qu’ils soient issus de Vitis vinifera ou du cépage hybrides, sont très parfumés.

Beaumes-de-Venise : du mot provençal balmes, « grottes » et de Venise, c’est-à-dire du comté Venaissin, partie du département de Vaucluse,entre Rhône, Mont Ventoux et Durance,comprenant les villes de Cavaillon, Carpentras et Vaison-la-Romaine. Commune française célèbre pour ses vins de muscat. Ses habitants sont appelés Balméens.
Coriandre (n.f.) ou Coriandre cultivée - Coriandrum sativum - du grec koriandron. Plante méditérranéenne de la famille des Ombellifères, dont le fruit séché aromatique est employé comme assaisonnement et dans la fabrication de liqueur.
Enferré, e (adj .) : du verbe enferrer, « garnir de fer ». Percer un adversaire avec le fer de son arme. Ici dans le sens de embrouillé.

Entrelacs (n.m.) : du verbe entrelacer. Ornement composé de motifs entrelacés, dont les lignes s’entrecroisent et s’enchevêtrent.

Oisif, ve (adj.) : du latin otiosus, « oiseux ». Qui, de manière momentanée ou permanente, est dépourvu d’occupation, n’exerce pas de profession.

mardi 13 mars 2012

Erithacus Rubecula (The Robin) - (en anglais)

Erithacus Rubecula (The Robin)

‘Speaks of an extraordinary simplicity...’

Ralph Dutli

The sparkling blue of the snow
Under the smoky tulle of the sky
And you, my little bird,
My providential companion
In orphaned solitude,
You who chisel out
The intimately granular facets of the air
With your voice of blue diamond
So as to speak
The entire brightness of creation.

The blood of your tiny throat
Is like a timeless rose
On the imponderable whiteness of the garden.

You, whose song
Inspires an invincible hope
In the sleeping stems
Which lie beneath winter’s
Soft harshness.

You, with your divine delicacy
In the midst of life’s
Sadnesses!

Translated from the French of Athanase Vantchev de Thracy by Norton Hodges

lundi 12 mars 2012

ERATICUS RUBECULA (français)

ERITHACUS RUBECULA

« Parle d’une inouïe simplicité… »

Ralph Dutli

Le bleu étincelant de la neige
Au-dessous du tulle vaporeux du ciel
Et toi, mon menu oiseau,
Mon providentiel compagnon
De solitude orpheline,
Toi qui cisèles
Les facettes intimement granuleuses de l’air
De ta voix de diamant bleu
Pour dire
Toute la clarté de la création.

Le sang de ta minuscule gorge
Est comme une rose intemporelle
Sur l’impondérable blancheur du jardin.

Toi, dont le chant
Inspire un espoir invincible
Aux tiges endormies
Sous la moelleuse rudesse
De l’hiver !

Toi, divine délicatesse
Au milieu des tristesses
De la vie !

Athanase Vantchev de Thracy
Paris, ce lundi 12 mars 2012
Glose :
Rouge-gorge (n.m. – pluriel rouges-gorges) - Erithacus rubecula : passereau de la famille des Passériformes. On l’appelle ainsi en raison de la couleur rouge du plumage de son poitrail.
Avec sa gorge orangée, le rouge-gorge est un oiseau reconnaissable entre tous. Pas plus grand qu’un moineau (il pèse 16 grammes en moyenne), il est commun dans toute l'Europe, où il vit habituellement à la lisière des forêts et dans les haies des jardins. Pour marquer, défendre et protéger son territoire, il chante sans cesse pendant toute l’année avec un regain de crescendo au printemps pour saluer le retour de la belle saison.
La femelle et le mâle sont en tout point pareils, ce qui les rend difficiles à distinguer. Comme la mésange bleue, la mésange charbonnière et la mésange huppée, le rouge-gorge est un sédentaire. Il hiverne là même où il a établi son domicile. L'oiseau aime s’installer dans les arbres et les buissons (merisier, noisetier, cornouiller) et les arbres fruitiers (pommier, poirier, cognassier...).
Le rouge-gorge se nourrit essentiellement d'insectes, de larves, de vers, de mille-pattes, d’araignées, de cloportes, de papillons, de chenilles, de perce-oreilles et de fourmis, mais aussi de limaces et d’escargots. A ce titre, il est un ami précieux du jardinier, qui trouve en lui un excellent prédateur des nuisibles du jardin. L’été, son régime alimentaire s’agrémente de baies comme des mûres, des framboises, des fruits de sureau... Sa familiarité avec les hommes est légendaire. Quand l’hiver survient, quand les insectes et les baies se font rares, il apprécie la nourriture que l’homme laisse à sa disposition dans le jardin ou aux abords de la maison.
Ralph Dutli, (né en 1954 à Schaffhouse) : poète, essayiste, biographe, traducteur suisse de langue allemande. Il fait des études de littérature française et russe à Zurich et à Paris, où il réside de 1982 à 1994. Depuis, il vit à Heidelberg (Allemagne).
Poète, il a publié Notizbuch der Grabsprüche (Le Carnet d'épitaphes, 2002), Novalis im Weinberg (Novalis au vignoble, 2005), Salz zu Salz (Sel ô sel, 2007). Essayiste, il est l'auteur de Europas zarte Hände (Tendres mains d'Europe, 1995) et Nichts als Wunder. Essays über Poesie (Rien que des miracles. Essais sur la poésie, 2007), mais aussi de Liebe Olive. Eine kleine Kulturgeschichte (Chère Olive. Une petite histoire culturelle, 2009) et Das Lied vom Honig. Eine Kulturgeschichte der Biene (Le Chant du miel. Une histoire culturelle de l'abeille, 2012). Traducteur du russe, il a édité et traduit les Oeuvres complètes d'Ossip Mandelsatam en dix volumes aux Editions Ammann à Zurich. Il a publié quatre livres consacrés au poète russe, dont une biographie intitulée Meine Zeit, mein Tier (Mon temps, mon fauve, 2003). Ralph Dutli est également le traducteur en allemand de trois livres de Marina Tsvetaïeva et d'un choix de poèmes de Joseph Brodsky, intitulé Brief in die Oase (Lettre à l'oasis, 2006).
Tulle (n.m.) : tissu transparent et vaporeux formé par un réseau de mailles régulières de fins fils de coton, de lin, de soie, de laine. Il trouve d’abord usage dans la mode féminine puis, avec l’apparition de pièces plus importantes, dans le linge de maison (nappes, serviettes, etc.).
L’origine du tulle est anglaise, mais l'usage donne l'origine du nom à la ville de Tulle, où l’on fabriquait une dentelle genre guipure selon une méthode manuelle appelée point de Tulle (ou poinct de Tulle). Le tulle était déjà connu à l’époque de Louis XIV.

Granuleux, granuleuse (adj.) : recouvert de petits grains que l'on sent au toucher.

dimanche 11 mars 2012

Brevitatis causa (en anglais)

ENGLISH :

Brevitatis Causa

‘Foam and rafts decorated with jade;
Tiny blue birds
Perched together on branches.’

Chiang K’uei (1155-1235)

Wouldn’t it be better,
Sitting beneath the murmur of willows,
To bow one’s head lengthily, calmly,
Assiduously
Over the breviary
Of small essential things?

To be moved by the eloquent courtesy
Of taciturn moments,
By the scrupulously silent white crocuses?

To feel against your hallucinated eyes
The soft and welcoming silk
Of your own modest eyelids!

Translated from the French of Athanase Vatnchev de Thracy by Norton Hodges 11.03.12.

samedi 10 mars 2012

BREVITATIS CAUSA

BREVITATIS CAUSA

“Mousse et radeaux s’ornent de jade;
Les oisillons, bleus et menus,
Perchent ensemble sur les rameaux.

Kiang K’ouei

Ne vaudrait-il pas mieux,
Sous le murmure aérien des saules,
Se pencher longtemps, calmement,
Assidûment
Sur le bréviaire
Des petites choses essentielles ?

Être ému par la courtoisie éloquente
Des instants taciturnes,
Par le mutisme attentif des crocus blancs ?

Sentir contre ses prunelles hallucinées
La soie douce et bienveillante
Des paupières pudiques!

Athanase Vantchev de Thracy

Paris, ce samedi 10 mars, Anno Christi MMXII


Glose :

Brevitatis causa : expression latine qui signifie « dit brièvement ».

Kiang K’ouei (1155-1235) : poète chinois de l’époque de la dynastie des Song (960-1279). Ts’eu, c’est-à-dire texte à chanter.

Crocus (n.m.) : du grec krokos, « safran ». Plante herbacée bulbeuse (famille des Iridacées) à floraison précoce. Crocus printanier à fleurs blanches, mauves, jaunes. Espèce de crocus cultivée : safran.

Hallucination (n.f.) : du latin hallucinatio. Perception de faits, d’objets qui n’existent pas, de sensations en l’absence de tout stimulus extérieur.

vendredi 9 mars 2012

LIFE (anglais)

Life

Cor ad cor loquitor
(‘Heart speaks to heart)
Motto of Cardinal Newman

Buried in the ground,
Covered with snow,
The grain of wheat
Keeps safe within itself
The flame of life.

In the time it takes
To read a book
To write a poem,
To wipe down a weapon,
The fragile stem grows
And lifts the melancholy of the clods of earth
Towards the transparent joy
Of Spring’s
Pure light.

Invincible,
Inviolable,
Life’s strange
Innocence!

Translated from the French of Athanase Vantchev de Thracy by Norton Hodges 09.03.12.

jeudi 8 mars 2012

LA VIE

LA VIE

Cor ad cor loquitur
(« Le cœur parle au cœur »)

Enfoui dans la terre,
Couvert de neige,
Le grain de blé
Garde en lui la flamme de la vie.

Le temps de lire
Un livre, d’écrire un poème,
D’essuyer quelques armes,
Pousse la tige frêle
Qui élève la mélancolie des mottes
Vers la joie transparente
De la pure lumière
Du printemps.

Invincible,
Inviolable,
Insolite innocence
De la vie !

Athanase Vantchev de Thracy

Paris, le 8 mars 2012

Glose :

Cor ad cor loquitur : locution latine. Devise du cardinal John Henri Newman (1801-1890), ecclésiastique britannique converti au catholicisme en 1845.

jeudi 1 mars 2012

BISHNOÏS

Bishnoïs

À Jambeshwar Bhagavan

« Roop anoop ramu pinde brahande, ghat ghat aghat rahayo,

(« Moi, la forme de Dieu, suis présente en toute chose,
laide ou superbe, visible ou invisible,
et j'erre en ce monde au sein de la plus petite des particules… »)
Chahad 19
I.

Maître,
Tu m’as appris le respect de toute forme de vie,
Tu m’as fait aimer la pure innocence des animaux,
La superbe élégance des arbres sacrés,
La divine humilité des fleurs qui réjouissent l’âme,
La transparence douce de l’eau
Et l’ondulation bleue du ciel.

Tu m’as appris, Maître,
La saveur inimitable de la terre sacrée,
La limpide austérité des lois,
La tremblante illusion de la chair,
Les hauts mystères de la science
Par laquelle l’homme lucide
Arrive à racheter son esprit !

II.

Bénie soit la langue immaculée,
Seule capable de procurer à l’homme
Quelque bonheur,
Quelque songe d’absolu !

III.

Tu m’as fait voir l’étrange plaisir
Que peut offrir la douleur.

J’ai compris, Maître,
Qu’à l’égal de l’être humain
Sont uniques tous les éléments,
Tous les mouvements de l’univers.

IV.

Dans ma vieillesse,
Dans mon année ultime,
Si la grâce des dieux m’est accordée,
Je m’incarnerai en chinkara,
En cette gazelle belle et docile
Qui, aimée par tous les vivants,
Gambade, joyeuse et sereine, par les prairies fleuries
Et prend son calme repos au milieu
Des lourdes herbes folles.

V.

Ô Vishnou,
Praeclarum custodem ovium !

VI.

Ô, Maître,
La raison apprend à l’homme sa petitesse !

VII.

Ô soubresauts des arbres
Dans l’avalanche azuréenne
Du ciel matinal !

Vents délicats qui dépliez
Les voiles des forêts intactes
Et la soie souple et fraîche de leurs feuilles !

Mains aurorales des femmes
Qui parlent de caresses, d’offrande,
De la douceur de la nuit accueillante !

VIII.

Je me lève le matin, je salue l’air,
Je m’incline devant l’élégance des montagnes,
Puis, ayant purifié mon corps
D’eau lustrale,
Je m’assieds,
J’ouvre et lis
Le Shabda-Vânî, notre livre sacré.

Je récite, le cœur battant, prosterné ou à genoux
Ses 120 versets de lumière
Pour remplir de la suavité des dieux
Chaque instant de la dure journée qui m’attend !

IX.

Je sais, Maître,
Que ce qui rend l’homme noble,
C’est de savoir, à la lumière de sa conscience,
Le mal qu’il fait ou peut faire, et donc d’y renoncer.
Ainsi mon âme exerce la dévotion envers
Le Dieu des dieux !
Mhe sare na bheta sîkh na puchhi, nîrat surat sab jani,
« Je n'ai jamais été disciple d'une école pour demander la connaissance.
Mais j'ai su la piété en consacrant mon moi à Dieu » !
Ja ja daya na maya, ta ta vikram kya,
« Là où la compassion et l'amour ne sont pas présents,
les bonnes œuvres ne peuvent arriver ».

X.

Qu’est d’autre l’être qu’un acte ?
Les étoiles ne s’éteignent jamais
Dans le ciel transparent
Des cœurs aimants !

Ah, Maître,
Comme j’aime la relation affectueuse des syllabes
Et des mots !
Je les chéris jusqu’en mon fond !
Ordre, unité, suffisance
Qui s’associent au sens intime de la vie !

XI.

Ô poèmes, rivières secrètes
De nos mémoires !
Par vous, je ne me convertirai jamais à mes limites
Ni à ma finitude,
Car des choses non sues, impénétrables
Emouvantes pour l’esprit, persistent
À vivre au-delà de mon maigre moi,
Continuent à renflammer l’éther.

Eternité de la matière,
Magiques réminiscences de nos cœurs !
Fines, déliées, ondoyantes pensées
Qui accompagnent
Les récitations de mes lèvres !

XII.

« L'intrépidité, la purification intérieure,
la fermeté à acquérir la science, la libéralité,
la maîtrise de soi, la réalisation de sacrifice,
l'étude sacrée, l'austérité, la simplicité !
L'ahimsâ, la non-violence universelle,
la véracité, la patience, le renoncement,
le calme, la sincérité,
la compassion envers toutes les créatures,
le désintéressement, la tendresse,
la pudeur, la détermination tranquille,
la force, l'endurance, la volonté, la pureté,
l'indulgence, la modestie, tels sont, ô Bhârata,
les traits de qui est qualifié pour une destinée divine. »

Ô Bhagavad Gita !

Il n’y a pas d’imperfection là où la main de l’aurore
Se pose pour se reposer
De tant d’émotions obscures !

Dormir, oui, dormir
Avec l’âme du monde
La tête abandonnée
Sur l’oreiller du temps amical,
Loin des tempêtes des chambres solitaires !

XIII.

Et toi, femme éternelle, Amrita Dévi,
Décapitée pour avoir voulu sauver la vie sacrée d’un arbre !
Tes filles et toutes ces femmes mortes
Pour que la vie soit rendue à la vie !

XIV.

Comme tout est beau
Quand bruissent à la fenêtre les pins musiciens,
Quand, dans les pinèdes luxuriantes
Les oiseaux disent leur amour
A l’aurore et au monde !
Des grues de perle blanches
Dans le ciel de brocart bleu !

Pouvoir mystique de la blancheur,
Indéclinables mots de l’Amour!

Et toi, félicité
Des âmes touchées par la grâce,
Image qui nie et affirme
La réalité de l’univers
Dans sa plus exacte plénitude !

Antique unité des eaux des mers,
Je ne suis que tremblement,
Sollicitude,
Vénération
Et Poésie !

Athanase Vantchev de Thracy

Paris, février 2012

Glose :

Les Bishnoïs (ou Vishnoï) : de bish, « vingt » et noï, « neuf » en rajasthani, une forme dialectale du hindi. Ce sont les membres d'une communauté vishnouïte créée par le maître, le guru Jambeshwar Bhagavan, appelé communément Jambaji (1451-1536), surtout présente dans l'État du Rajastan. Les Bishnoïs sont des hindous vashnav qui suivent vingt-neuf principes (chahad), d'où leur nom édicté par leur gourou. Ils se caractérisent par leur végétarisme, leur strict respect de toute forme de vie, leur protection des animaux ainsi que des arbres, leur adoption d'une tenue vestimentaire particulière. Ce sont les rares hindous à enterrer leurs morts pour éviter de couper le bois.

La gazelle indienne ou chinkara (Gazella bennettii) est particulièrement vénérée par les Bishnoïs. Leur maître Jambeshwar Bhagavan leur avait déclaré qu'il se réincarnerait indéfiniment en chinkara après sa mort. Sa présence signale souvent un village ou un temple proche de la communauté où on la trouve déambulant en toute confiance entre les maisons. Il arrive souvent encore de nos jours que les femmes bishnoïes allaitent les faons orphelins de cette espèce.

Le Shabda-Vânî, ou Guru-Vani, est le livre saint de la sampradaya, une forme parmi d'autres du vishnavisme. Il contient 120 versets, récités pour le culte domestique ou au temple. On y trouve la volonté d'épargner et de protéger toutes les créatures.

Le sacrifice d'Amrita Devi et des autres Bishnois

La communauté bishnoïe a connu de graves problèmes lorsque le monde extérieur a pu mettre à mal leurs principes.

Elle garde ainsi en mémoire un événement qui se déroula en 1730 lorsque le mahârâja Ajit Singh de Jodhgpur envoya des coupeurs de bois (ses soldats) dans les villages pour couper les gros arbres, notamment les khejri, parmi les plus fameux du désert : il avait besoin de bois pour alimenter ses fours à chaux dans le cadre d'un vaste chantier de rénovation de son palais.

Ses hommes se rendirent sur les terres bishnoïes pour abattre des arbres : les Bishnoïs sortirent de leur village et leur demandèrent de ne pas dévaster les forêts, expliquant que c'était contraire à leurs préceptes religieux.

Le maharadja confirma son ordre et les soldats se mirent à couper. Une femme de la communauté, Amrita Dévi, ainsi que ses filles et d'autres femmes, s'interposèrent pour leur interdire cet abattage, entourant chacune un arbre de leurs bras.
Puis hommes, vieillards, jeunes suivirent l'exemple des femmes. Tous prirent un arbre à bras le corps et les soldats coupèrent, mutilèrent, sans distinction, les arbres et les Bishnoïs. En tout, 363 personnes furent ainsi massacrées pour avoir tenté de protéger les arbres.

Il n'existe pas d'autre exemple dans l'histoire humaine, et dans le reste du monde, où des êtres humains offrirent leur vie pour sauver la vie des arbres.
Suite au massacre, le roi de Jodhpur, ayant appris le nombre de victimes et afin d'honorer le courage des Bishnoïs, ordonna que les zones habitées par ces derniers devinssent sacrées et qu'en ces lieux nul homme étranger à leur religion ne manquât de respect à leurs 29 commandements.

Praeclarum custodem ovium : expression latine qui signifie “excellent protecteur des brebis”.