samedi 26 juin 2010

LA FOI

LA FOI

A Kram Ngoy



Foi, foi de lumière,
Tu as chargé de roses blanches
Mon innocence !

Eau douce de ma vie,
Ma rivière vive !

Foi
Qui me purifies,
Me portes,
Me chéris
Me rends à moi !

Tu veilles sur moi
Quand les oiseaux de la tristesse
Viennent la nuit picorer
Les grains odorants
De ma mémoire !

Toi,
Mesure du temps,
Demeure discrète
De la félicité !

Âme, lève-toi,
Mets ta robe de poésie
Et marche vers la Fleur pure !


Athanase Vantchev de Thracy

Marrakech, le 26 juin 2010

Glose :

Kram Ngoy (1865-1936) : poète classique cambodgien. Voilà ce que dit de lui Keng Vansak dans la Revue française, N° 206, janvier 1968 :

« C'est la tradition de réalisme critique et constructeur qui a permis l'éclosion d'un grand poète national khmer au siècle de la répression coloniale. C'est notre Kram Ngoy véritable poète populaire et patriote. Les vers coulaient naturellement de sa bouche sous forme de chants qu'il accompagnait lui-même de sa guitare monocorde. Cette guitare, il la promenait partout avec lui, rythmant ses poèmes qui jaillissaient de son coeur compatissant et de sa conscience douloureuse. En effet, il voyait les méfaits du pouvoir colonial contre lequel il ne pouvait pas grand-chose.

Alors, de village en village, de pagode en pagode, de maison en maison, il chantait la misère, la pauvreté et surtout le poids des impôts (même sur une poignée de riz) que les administrateurs coloniaux faisaient pleuvoir sur le dos des paysans khmers. Et cela sans aucune haine, mais avec un cri vibrant de douleur devant l'inertie, la paresse, l'ignorance et le manque de solidarité de ses propres compatriotes. Il ne pouvait croire que les Khmers vivant sur leur sol se laissaient dominer et exploiter par les riches commerçants chinois, lesquels " arrivaient de Chine juste avec un pantalon sur les genoux ". Tout cela " par la faute des Khmers eux-mêmes qui, par passivité, se contentaient de tout acheter sans rien produire ". Il pleurait devant l'abrutissement de ses compatriotes à cause des superstitions et des croyances absurdes entretenues par des personnes intéressées. Il souffrait de voir les religieux eux-mêmes se disputer au nom du nouveau ou de l'ancien Dharma et cela pour la même doctrine de Bouddha... Alors il exhortait ses compatriotes à la concorde, au travail, à l'étude, à la prise de conscience, et surtout à l'union nationale afin de mieux résister aux difficultés de la vie et à la rapacité des étrangers.

Tous ses chants ont fait l'objet d'un recueil de poèmes. Ils ont trouvé écho chez Mlle Suzanne Karpelès, alors directrice de l’Institut bouddhique de Pnom-Penh. Elle a accepté de les faire publier et en récompense à notre poète, elle lui a donné une piastre.

C'était peu, mais énorme par la signification d'un tel geste presque historique qui montrait que les Français n'étaient pas tous des colonialistes, mais qu'il existait bien parmi eux de savants défenseurs de la culture nationale khmère. »

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